28 septembre 2006

Promesses, promesses...

Lors de la dernière réunion concernant la bibliothèque, notre estimé bourgmestre m'avait promis d'inclure, dans le programme de son parti pour les prochaines élections communales, le renforcement du service bibliothèque. Il a notamment certifié -devant témoins et après que je lui ai posé la question 'tu le feras, hein?'- qu'il incluerait l'engagement d'une personne supplémentaire. Le programme a été distribué hier dans toutes les boites aux lettres communales. Il est très beau, papier glacé et plein de photos couleurs. Et, tiens donc, il y a bel et bien un photo de la bib dans le chapitre consacré à la culture, mais pour le reste : bernique. Je parie que lorsque je lui ferai remarquer, il me répondra : 'ça ne veut pas dire qu'on ne le fera pas'.
Colloque (3 et puis j'arrête)

En matinée, un des deux animateurs de l'atelier a eu cette jolie expression : 'pour que nous ne soyons plus les Rémi Brica de la lecture publique'....

27 septembre 2006

Colloque (2)

Après un repas qui n’aurait pas fait tâche au mess de la caserne la plus proche, c’est l’estomac solidement calé que nous nous sommes rendus vers nos ateliers de l’après-midi. Cette fois, j’avais opté pour ‘l’offre et les ressources’. Soit, primo, les collections et autres services que nous mettons à disposition répondent-ils bien aux attentes de nos usagers et, secundo, les normes que nous devons respecter (pourcentages de documentaires/fictions, taux d’élagage etc…) ne sont-elles pas handicapantes et/ou dépassées ? Pas aussi charismatiques et structurés que nos animateurs du matin, nos meneurs de débat n’ont pas réussi à faire décoller le propos. Parmi nous, un monsieur, la cinquantaine barbue et blanche qui n’était plus bibliothécaire, mais l’avait été autrefois pendant deux ans, se voyait bien dans le rôle de celui qui met les pieds dans le plat. Il a commencé par enfoncer quelques portes ouvertes : ‘Les bibliothécaires, vous êtes les derniers remparts de la démocratie, vous êtes de véritables passeurs de culture…’, avant de lancer quelques idées révolutionnaires : ouverture des bibliothèques le dimanche et installation de guichets automatiques pour la rentrée et la sortie des ouvrages (ce qui permettrait, selon lui, aux bibliothécaires de se consacrer à des tâches de conseil et d’aiguillage des lecteurs). C’est tombé assez à plat et ça en a même énervé quelques-uns, surtout quand il cité comme exemple les caisses automatiques qui fleurissent dans nos grandes surfaces commerciales. S’il ne s’agissait pas d’idées stupides, elles n’étaient : un, pas neuves et deux, difficiles à mettre en place avec les moyens dont nous disposons. Car ouvrir le dimanche, avec le même personnel, ça signifie forcément perdre des heures d’ouverture par ailleurs. A quoi il répondit, décidément condescendant, : ‘mais allez trouver vos échevins, et demandez plus de moyens, dites-leur que vos lecteurs sont aussi des électeurs !’ Ben tiens, on n’y avait jamais pensé.
Colloque

Lundi spécial. Bibliothèque fermée, usagers prévenus il y a mois, je pars donc le cœur léger, avec juste un peu de remords mais pas trop, à la ‘Journée de réflexion sur les enjeux et perspectives des bibliothèques publiques’, organisée par le Service de la Lecture Publique, à l’initiative du Conseil Supérieur des Bibliothèques Publiques. Ca se passait à la Marlagne, pas loin de Namur, un domaine que je ne connaissais pas, jamais été, bâtiment énorme, style cathédrale de bois et de verre, avec une salle de réfectoire gigantesque, un véritable hall de gare perdu en pleine nature. Bien que la journée de travail devait débuter à 9h15, ce n’est que vers 10 heures que nous avons été conviés à rejoindre nos différents ateliers. Me concernant, celui du matin était consacré aux ‘non-publics’, charmante appellation pour définir cette catégorie de personnes qui ne fréquente pas nos bibliothèques. Nommer quelqu’un par ce qu’il n’est pas me semble toujours un peu limite mais il est vrai que tout ce que nous savons de ces personnes, c’est ça : ils ne sont pas usagers de nos lieux de travail. Je ne compte pas vous faire un résumé de ce que nos cerveaux de bibliothécaires ont pu mûrir sur ces deux petites heures : ça sera publié dans le prochain numéro de la revue ‘Lectures’. La conversation a évidemment beaucoup tourné autour de ce souci lancinant qui est le nôtre : comment procéder pour qu’ils (les non-publics) se métamorphosent en publics ? Pas grand-chose de neuf, mais le niveau des interventions dépassait largement les habituelles complaintes que l’on peut entendre en ce genre d’occasion : mon bourgmestre ceci, mes collègues cela, et mes lecteurs, quelle bande d’emmerdeurs. Niveau correct donc, mais je reste toujours dubitatif : s’ils ne veulent pas venir, faut-il réellement aller les chercher et donc, consacrer un temps et de l’énergie dont les usagers eux, seraient sans doute bien contents de bénéficier ?

23 septembre 2006

Le bruit au-dessus de la bib.

A l'étage, dans l'appartement géré par la commune, vit une femme seule, avec ses deux enfants. Il y a le plus jeune, qui vient souvent me voir avec sa classe de l'école communale. Et l'autre, un peu plus agé, qu'une camionnette ramène tous les jours vers 16h. Le monsieur qui accompagne le chauffeur est obligé de le porter jusqu'aux bras de sa mère, qui elle-même le hisse péniblement jusqu'à son logement. Parfois, ça commence dès qu'il est rentré : les meubles que l'on déplace, les objets frappés à terre répétitivement ou qui chutent, et puis les cris, les hurlements presque. Comme il ne sait pas marcher, j'imagine qu'il se traîne à terre, qu'il rampe en quelque sorte d'un endroit à un autre. Ca peut durer de deux à trois heures d'affilée, avec de trop rares moments d'accalmie. Je suppose que cette pièce au-dessus de la bibliothèque lui est réservée. Les lecteurs qui tombent en pleine crise me demandent régulièrement s'il y a des travaux à l'étage.

20 septembre 2006

Blog

Sur le blog de Nekita, dans la partie 'bibliothèque', des tranches de vie d'une bibliothèque citadine qui sentent le vécu. Je préfère ma place à la sienne. Je suis sans doute parfois bien trop peu nombreux pour assurer le service que je voudrais, mais au moins, je ne dois pas me farcir un supérieur hiérarchique comme le sien. Et ce n'est qu'un exemple. Son public 'jeune' n'est pas triste non plus. Néanmoins, ses posts respirent le plaisir qu'elle conserve à faire son métier. Respect donc.

14 septembre 2006

Blog

Le Suburbain Librarian nous propose, dans son billet du 9 septembre, quelques petits trucs pour survivre à la rentrée littéraire. C'est bien marrant, j'applique tout de suite.

13 septembre 2006

Appréciations

Ces derniers temps, deux commentaires, un gentil et un nettement moins. Gardons le plus mignon pour la fin. Le désagréable provient d'une dame membre de je ne sais quel groupe adepte des rallyes touristiques. C'était un samedi à l'aube et le vendredi soir avait été assez difficile. Ils étaient une petite dizaine, vers les 9 heures, jaillis de deux ou trois voitures parquées sur la place. Les premiers sont entrés et m'ont assailli de questions auxquelles je ne pouvais répondre sans faire quelques recherches préalables : 'on a des questions sur l'histoire du village, vous avez trois minutes'. Texto. Prévenus que j'étais bibliothécaire et pas concurrent de leur truc à la noix, je les guide jusqu'à la salle de lecture. Pendant que deux d'entre eux faisaient mine de s'intéresser aux bouquins que je leur avais renseignés, les autres sautillaient pratiquement entre les rayons. Le rallye, ça avait l'air sérieux. Et urgent. Bref, tellement urgent qu'ils n'ont pas pris le temps de parcourir les bouquins et sont ressortis bredouilles. Les trois minutes étaient écoulées. Sur le pas de la porte, voilà-t-y pas qu'ils croisent d'autres participants, des concurrents donc, et l'une des stressées sur le départ lâche : 'Oui, c'est la bibliothèque, mais le monsieur n'est pas très collaborant'.
Quant à l'agréable, il est sorti tout naturellement, d'une lectrice même pas mieux traitée que les autres : 'Quand je viens à la bibliothèque, c'est à chaque fois comme si je ressortais avec un cadeau'. Voilà qui équilibre la balance.


Bibliothèque : silence

La valse des tondeuses menées par mes confrères ouvriers communaux sur les espaces verts autour de la bibliothèque. Ils s'y mettent à deux pour aller plus vite : une heure de mélodie en mode moteur. C'est vrai qu'après, c'est plus joli.

La porte d'entrée qui se referme avec force : métal du pêne qui heurte le métal de la gâche. Le ferme-porte à ressort, c'est obligatoire : les pompiers l'ont dit.

La fête foraine, une fois par an, juste ici devant. Dès 16 heures, ambiance musicale assurée. Enfin, musicale, on se comprend. Une semaine. Et en plus, ça monopolise les places de parking.

Les classes des écoles communales. A chaque visite : brouhaha et cris des instit' qui tentent de se faire entendre. Parfois, hurlement du bibliothécaire dont le témoin de décibels supportables vire à l'écarlate. Mais ça fait longtemps maintenant. Je découvre les vertus du silence et de la grève. Trop de bruit : je ne fais plus rien et la file s'allonge devant le comptoir. Évidemment, les schtroumpfs s'interrogent et me regardent curieusement. Il y en toujours bien un qui finit par comprendre.

Les chaises poussées ou tirées sur le carrelage. J'en ai déjà parlé. C'est de ma faute : il me suffirait d'acheter des pastilles de mousse à coller en-dessous des pieds. Ils en vendent dans les grandes surfaces suédoises spécialisées en mobilier, je sais.

Les conversations dans le bureau d'à côté : souvent ce même type déboule, celui qui parle très fort. Il ne s'en rend sans doute pas compte, il travaille dans un usine métallurgique. Je suppose que c'est une forme d'adaptation à l'environnement de travail.

La course de côte. Les sports moteurs figurent en bonne place dans mon palmarès de la bêtise humaine. La course de côte en explose les limites. Une fois par an, c'est à celui qui monte la côte le plus rapidement. Et évidemment, ce jour-là, ils se donnent rendez-vous ici devant et gaspillent du carburant à l'arrêt, le temps que chaque concurrent fasse entendre aux autres que son moteur est bien le plus bruyant.

Les femmes qui se retrouvent par hasard devant mon comptoir. Elles ne se sont plus vues depuis longtemps et n'hésitent pas à échanger les derniers potins du village. J'en apprends de belles.

06 septembre 2006

Un blog

Les médiathécaires de la Médiathèque de Romans ont de l'humour : ça se lit sur leur blog...La partie 'jargon de bibliothécaire' notamment vaut le détour. Je suis un peu jaloux de la taille de leur équipe.


Une autre liste

Les deux premiers albums de Neil Hannon, alias Divine Comedy, font partie de mon petit panthéon personnel. Sortis respectivement en 1993 et en 1994, 'Libération' et 'Promenade', merveilles de pop romantique (j'ai cherché un autre qualificatif, n'étant pas journaliste rock, j'en suis resté à celui-là) se retrouvent régulièrement dans mon lecteur, sauf quand certains amis grincheux ouvrent une bouteille à proximité. Trop mou, trop sirupeux disent-ils la moue boudeuse. Comme je suis conciliant, on écoute le premier Nirvana et l'amitié ne faiblit pas. C'est le bouquin de Sagehomme qui m'a rappelé que sur le deuxième D.C, il y avait cette chanson, 'The Booklovers' dans laquelle Hannon égrenne mélodiquement une liste de noms d'auteurs. Pour le coup, j'ai réécouté tout l'album et c'est toujours aussi beau. Et ça donne plus envie de découvrir les auteurs qu'il cite que le répertoire moral du révérend.
R(I)P - 2ème partie

Le bouquin du R.P. Sagehomme se présente donc comme un répertoire alphabétique d'auteurs, avec en-dessous de chaque nom, une liste d'oeuvres 'cotées' selon le code suivant :
E = pour enfants
TB = pour tous
B = pour jeunes gens formés
B? = appelle des réserves plus ou moins graves
D = dangereux, à déconseiller
M = mauvais
Si la liste comporte une grande majorité de noms et de titres tombés dans l'oubli le plus complet, les 'classiques' sont bel et bien là, quoiqu'un Sade par exemple brille étonnement par son absence.
C'est un plaisir de vous livrer quelques morceaux choisis :

Les pires :
Maupassant : meilleure cote : B?...sinon, rien que des M
Hugo : meilleure cote : B, avalanche de D et de B? (Les Misérables? M!)
Simenon : meilleure cote : B?
Voltaire : 20 M et 4 B?
Flaubert : 9 M, 2 B et 1 D
Céline : M et B?
Ajoutez tous les Russes, Léon Bloy, Jean Ray, Sand, Shakespeare (que des B?), Colette et même Alphonse Allais...

Les meilleurs :
Conan Doyle, la Comtesse du Général Dourakine, Andersen, Fenimore Coopper, Daniel Defoë, les frères Grimm, Corneille, Curwood, Poe, Racine, Alphonse Daudet....

Beaucoup de sottises donc, et pas seulement attribuables au temps qui passe, à l'époque ou au contexte. Même l'aspect politique ne semble pas avoir joué, puisqu'un Céline ou un Brasillach ne trouvent pas grâce aux yeux du R.P., alors qu'un Conan Doyle obtient sa bénédiction...

05 septembre 2006

R(I)P – 1ière partie

Il fait partie de ces quelques bouquins laissés par mes prédécesseurs, les directeurs d’école et autre pharmacien qui se sont occupés de la bibliothèque avant moi, valeureux pionniers de la lecture publique, qui s’en allaient au combat sans même le soutien d’un ordinateur ou l’idée de la naissance de l’ISBN ! Il y en a d’autres, j’en parlerai plus tard, s’y replonger de temps en temps donne une bonne idée du chemin parcouru. Celui-ci, c’est le ‘Répertoire alphabétique de 10.000 auteurs avec 40.000 de leurs ouvrages (Romans et pièces) qualifiés quant à leur valeur morale’. J’en devine qui sourient. Qu’ils s’accrochent, ça ne fait que débuter. Le nom de l’auteur n’est pas mal, à croire qu’il s’agit d’un pseudo : ‘G. Sagehomme, S.J.’. Plus loin dans l’avant-propos, on peut lire qu’il s’agit d’un ‘R.P’, soit Révérend Père, en exercice au Collège Saint-Michel de Bruxelles. Publié en 1939 par Casterman, ce ‘recueil est destiné aux âmes honnêtes qui veulent le rester, aux pères et aux mères de famille, aux directeurs de conscience, qui savent quel mal une mauvaise lecture peut faire à un cœur. Ils trouveront ici une brève réponse à cette question : « Puis-je lire tel roman ? Puis-je le donner en lecture à mes enfants, à mes pénitents ? »’ Pas de jugement littéraire, donc, ni même d’appréciation sur l’intérêt des titres cités, puisque l’auteur ‘a uniquement voulu dissiper, dans une certaine mesure, ce doute parfois angoissant : "Puis-je, en conscience, lire ou faire lire ce livre ?" '.
Quarante mille titres, on ne peut s’imaginer que le brave Sagehomme les ait tous lus ? Il l’admet volontiers. Ses sources ? ‘Il a puisé ses appréciations, d’abord dans ses notes personnelles, puis surtout dans les revues et dans les catalogues des bibliothèques catholiques’. Voilà qui dissipe la volute de doute qui planait encore dans vos esprits. Ce répertoire s’adresse d’abord aux responsables de bibliothèques catholiques. Bizarre de le retrouver ici, dans une bibliothèque dépendant d’une commune belge qui vient de fêter son siècle de gestion par une majorité socialiste.