31 janvier 2008

Le poids de la culture

Puisque tu n'as pas su terminer 'La dentellière d'Alençon', de Janine Montupet -trop compliqué- tu me demandes conseil : 'quelque chose de plus facile, d'amusant, histoire de me reposer un peu'. Parcourant les nouveautés, je te suggère le dernier Woody Allen. 'Woody Allen? Il a écrit des livres?' Tu soupèses l'ouvrage, parcours le 4ème de couverture : 'ben, mon éducation ne m'a pas habituée à lire des livres aussi minces, mais enfin, pourquoi pas?'. Histoire d'être sûre que mon petit cerveau a bien assimilé l'info, tu ajoutes : 'je lis toujours des gros livres'. Sidéré par la justesse inédite de ce critère de sélection, je m'en retourne, silencieux, derrière le comptoir. J'enregistre tes emprunts et le temps pour toi de rassembler enfants, clés de voiture et sacs divers, je te regarde. Il n'est effectivement pas très difficile de t'imaginer, petite fille, rentrant de l'école, pliée en deux sous le poids ton cartable. Ton père, sévère mais juste, t'attends dans son bureau. Le temps de lui présenter tes respects et, de sa belle voix grave, il t'informe du programme de cette fin de journée : 'aujourd'hui, ma petite, ça sera 250 grammes de Victor Hugo'.

30 janvier 2008

Par les sentiments

A l'éternelle question de savoir 'mais non didju, comment donner le goût de la lecture à nos chères têtes blondes?', un maire espagnol vient d'apporter une réponse -à mon avis- inédite. En tous cas, si les jeux télés ne vous avaient pas convaincu que l'être humain, à partir du moment où une somme d'argent lui est promise, est capable de tout, voici de quoi possiblement vous faire changer d'avis. Je vous livre l'info telle qu'elle figure sur 'fil info' du 'Soir' :

Des enfants payés un euro de l’heure pour lire

mercredi 30.01.2008, 12:51

Les enfants du village espagnol de Noblejas seront désormais payés pour lire. Ainsi en a décidé leur maire, Agustin Jimenez Crespo, persuadé que cette initiative « pionnière » leur fera aimer la lecture. La commune de 3.300 habitants, située à 55 kilomètres de Tolède (centre), « subventionnera les familles à hauteur d’un euro par heure passée à la bibliothèque » par leurs enfants scolarisés en primaire, a annoncé la mairie dans un communiqué. Il s’agit d’une « initiative pionnière et ambitieuse en matière d’éducation », ajoute la mairie, qui explique que l’objectif est de « renforcer le rôle actif des parents dans l’éducation de leurs enfants ».


Juste une chose : est-ce que TOUTE une heure pour SEULEMENT un euro, ce n'est pas pousser un peu loin l'ambition culturelle?

24 janvier 2008

Répondeur

Deux messages après le week-end. Une voix d'homme grommelle sur le premier. Rien compris. Second message, même voix : 'c'était pour savoir si vous aviez Léon, de Léon Walter...[blanc]...chez Tillage'. Clop. Raccroché.
Ben oui, on l'a et il est même disponible. Si tu m'avais laissé ton numéro de téléphone, je t'aurai appelé pour te prévenir. Je me serai même abstenu de toute remarque désagréable à propos de tes références erronées. Leon Walter Tillage, c'est son nom à l'auteur. Tillage, ce n'est pas un éditeur. Mais bon, on est habitués à ce genre de cafouillage et, en général, avec un seul mot -titre ou auteur- on arrive à retrouver ces bouquins que l'école vous force à lire. Trop forts hein, ces biblios?

Malheureusement, pas plus qu'elle ne t'a appris à dire bonjour pour commencer une conversation, ta maman ne t'a dit de te présenter et de laisser tes coordonnées...

11 janvier 2008

Mercredi matin

Départ quelques minutes avant 8h. Les infos à la radio m'apprennent que, finalement, les sondages se sont plantés et que Hillary s'en tire bien. De son côté, Guy a remis au Roi une note exposant sa vision de l'avenir de notre pays. Suffit. Je zappe et l'auto-radio reprend la lecture du cd en cours.
New Pornographers : 'Go Places'. (Yes a heart should always go one step to far).
Les phares des voitures que je croise m'éblouissent. Il ne me semble pas que ça me gênait autant avant. Les constructeurs les ont-ils conçus plus puissants? Springsteen : 'Radio Nowhere'. Ou alors, ce sont mes yeux. Plus aussi vaillants. Déposer les filles à l'école. Un baiser de chacune avant l'ouverture des portes. Une fois sorties, elles ne se retournent jamais. Pas de dernier signe de la main. Est-ce qu'à leur âge, je le faisais pour mon père? J'attends quelques secondes. Ca va trop vite. Joan Osborne : 'One of us'. (What would you ask if you had just one question?).
C'est jour de marché et ça bouchone. Il fait encore trop sombre pour lire en attendant de pouvoir enclencher la première. Heureusement qu'il y a la musique. Encore un arrêt. Déposer les livres à plastifier et récupérer ceux laissés avant le congé.
White Stripes : 'Jolene'. Quelques kilomètres et on y est. Fermée pour travaux pendant des mois, une des quatre routes qui mène au village vient d'être rouverte. Ma préférée, sinueuse et arborée. J'arrive sur la place, la bib est toujours là, tout est allumé, la femme de ménage arrive tôt. Killers : 'Tranquilize'. (Always here, always on time). Précisément.

09 janvier 2008

Extraits



Pour en finir et bien que cela ne finisse jamais, quelques phrases extraites des 'Disparus' de Daniel Mendelsohn, dont je parlais il y a peu.


'Nous sommes, chacun de nous, myopes, ais-je compris à cet instant-là; toujours au centre de nos propres histoires'.


'J'ai pensé aussi combien il est plus facile, souvent, d'être cruel avec ceux qui sont véritablement nos proches, avec ceux que nous connaisons intimement'.


'Parce qu'il est historien de formation, tout comme je suis héléniste, il essaie de voir les choses dans leur complexité, se méfie des généralisations, tout comme j'aime regarder les problèmes à travers la lunette de la tragédie grecque qui nous apprend, entre autres, que la véritable tragédie n'est jamais une confrontation entre le Bien et le Mal, mais plutôt, de façon plus exquise et plus douloureuse à la fois, un conflit entre deux conceptions du monde irréconciliables.'

03 janvier 2008

La bibliothèque est un lieu de passage

Suite à ceci donc, les plus attentifs d’entre vous auront remarqué que j’avais numéroté ce sympathique petit récit du 30 octobre. C’est donc qu’il y en avait –au minimum- un deuxième. Que voici.
Le cadre : la bibliothèque de Liège, la grande, la principale : Les Chiroux. Certains de nos confrères avaient noté l’étrange manège : un jeune homme, toujours le même, stationnait devant l’entrée du bâtiment durant d’assez longues périodes. Stationnait pédestrement j’entends. A intervalles réguliers, il faisait une courte incursion dans le hall d’entrée, jusqu’au présentoir à dépliants publicitaires. Il faisait mine d’y farfouiller quelques secondes, juste avant de s’éclipser prestement. Aussitôt une autre personne rentrait à sa suite et se dirigeait, elle aussi, droit vers le présentoir qui subissait le même sort farfouillesque. Au bout d’un temps, ils ont compris, nos confrères. Se sont précipités juste entre les deux personnes et ont découvert ce que la première avait laissé et ce que la seconde venait y chercher : un sachet d’une quelconque stupéfiante matière.