31 mai 2007

Qué passa?

Ben oui, je vous lis chers confrères bibliobloggueurs, notamment ceux qui figurent dans ma liste de liens. Or donc, depuis quelques jours, 'Suburban Librarian' n'est plus accessible : un mot de passe nous est demandé. La biblioblogosphère deviendrait-elle un domaine réservé à quelques initiés? Nous retirerions-nous du commun des bloggueurs (les non-bibliothécaires)? Ou, plus simplement, notre ami aurait-il publié certaines photos trop compromettantes? Hmmmm?

30 mai 2007

La relève

Sa maman m'avait déjà livré le secret : plus tard, elle serait bibliothécaire. C'est en sortant d'ici que sa fille de cinq ans lui avait fait part de ce projet. Voilà qui nous change des habituels 'infirmière', puéricultrice' ou autre 'institutrice' que nous sortent les petites filles à cet âge-là, lorsque la mauvaise idée nous vient de leur demander ce qu'elles comptent 'faire plus tard '. L'idée chemine en tout cas dans l'esprit de cette jeune lectrice. En témoigne cette réflexion, également rapportée par sa maman : 'quand je saurai lire, tu m'empêcheras de dormir, comme ça je lirai encore plus de livres'.
Voilà qui me rappelle le leitmotiv de notre prof de littérature française, régulièrement asséné aux bibliothécaires en devenir que nous étions : 'dormez moins, lisez plus!' Je le vois encore, les poches sous les yeux témoignant d'une mise en pratique assidue de ce précepte.
Pour ma part, c'est en vain que je l'applique : la pile de livres 'à lire absolument' se régénère comme par magie.

29 mai 2007

Fait divers

Je m’en souviens comme si c’était hier. Je rangeais péniblement des bouquins dans les rayonnages –c’était un samedi matin. Toi, tu faisais ton choix. En quelques minutes, j’ai laissé tomber deux serre-livres à terre : ils sont en plastique bien dur, ça fait du bruit sur le carrelage. J’ai finalement repoussé le chariot de rangement vers sa place et là, c’est à une avalanche de ces mêmes serre-livres que nos oreilles ont eu droit. Tu t’es approchée en souriant, puis tu m’as dit : ‘c’est pas votre jour’ et tu en a ramassé quelques-uns. Je t’ai remerciée pour ce geste, il confirmait bien mieux que n’importe quelle parole la sympathie que tu m’inspirais. Aujourd’hui, je lis dans le journal ce qui t’es arrivé samedi dernier. La moto, ça n’ a jamais été mon truc. Peut-être est-ce lui qui aimais ça, ce monsieur un peu bougon qui t’accompagnait à chaque fois. Je lis et je relis cet entrefilet et je n’arrive pas y croire, et me reviennent en mémoire ces quelques mots que tu m’avais gentiment adressé : ‘c’est pas votre jour’.

21 mai 2007

Signets

une carte postale d'une de tes amies
un emballage de préservatif -vide-
une feuille de papier toilette
une photo de Monsieur couché sur son lit
une autre de ton chien
un mot d'amour assez cru
la feuille que l'on décolle d'un protège-slip
un photo de ton chat
des billets de train, des listes de courses, des tickets de caisse, des extraits de compte bancaire
une carte de remerciements après un décès -avec la photo du défunt-
des photos de toi, en pleine fiesta
une recette de cuisine -pas essayée-
un cure-dent
une carte de voeux pour l'année nouvelle
une lime à ongle -modèle métallique-
et, chaque année, en septembre : du sable fin

10 mai 2007


Nazis suédois


Stefan Lindman est policier. Nous l’avons déjà rencontré dans ‘Avant le gel’, la première enquête de Linda Wallander, du même Henning Mankell. Il y tenait un second rôle. Il n’a pas encore 40 ans, mais il a déjà un cancer. De la langue. C’est la seule chose à laquelle il arrive à penser. Cette foutue boule sous son palais. Même la sollicitude de sa compagne Elena n’arrive pas à calmer ses angoisses. Le temps que les analyses soient terminées, il se prépare à vivre l’enfer, incapable de se concentrer sur autre chose que cette lancinante question ‘combien de temps me reste-t-il ?’. C’est la mort de son ancien collègue Herbert Molin qui va le tirer de sa léthargie. Celui-ci a été torturé dans sa petite maison perdue dans les bois, là-bas, dans le fin fond de la Suède. Bien qu’il n’ait aucune légitimité pour enquêter en-dehors de Boras, sa ville, Lindman décide d’effectuer le voyage dans le Härjedalen, la contrée que Molin avait choisie pour ses vieux jours. Très vite, il se rendra compte qu’il ne connaissait pas le vieil homme et que le passé de Molin devait être assez lourd à porter. Mais ce qui va le plus déstabiliser Stefan, ce sont d’autres découvertes imprévues. Et qui le touchent de près, puisqu’elles concernent son propre père, un homme de la même génération que celle de Molin.
Inutile de le cacher, puisque le fait apparaît très clairement dès les premières pages du livre, le cadre de l’enquête de Lindman, c’est la Seconde Guerre mondiale et, plus précisément, l’attitude de certains suédois durant cette période, attitude qui continue à faire des émules autour de Stefan. Imprégné de sa maladie, co-habitant avec son cancer, Lindman, va trouver dans cette enquête de quoi détourner son attention : peut-être y a-t-il là quelque chose de pire que son cancer ? Quelque chose de plus dangereux que cette maladie et qui mérite qu’il s’y attaque de toutes les forces qui lui restent ? Cette enquête, il ne va pourtant pas cesser de vouloir l’abandonner. Sans arrêt, ses collègues et sa compagne lui demandent : quand rentres-tu ? Et de répondre à chaque fois : ‘demain’ ou ‘après les obsèques’. Et pourtant, il ira bien jusqu’au bout, à l’image de Wallander, l’autre personnage de Mankell qui, lui aussi, s’interrogeait sans cesse sur le pourquoi de ses enquêtes et qui, malgré tout, les menait toutes à bien. Comme lui, Lindman est animé par une force qu’il ne comprend pas lui-même, une pulsion qui le pousse à aller jusqu’au bout de ce qu’il a entrepris, au-delà des difficultés et de la répulsion que lui inspirent certains agissements sur lesquels il enquête. Comme s’il y avait là une promesse muette. Celle d’une vie qui ne s’arrêterait pas si facilement ?
Une fois encore, Mankell touche à l’essentiel et, même s’il se défend de vouloir donner des leçons, au travers de ses personnages campés tout en finesse et d’une intrigue encore une fois passionnante, c’est à penser qu’il nous incite. Et à garder les yeux ouverts.


'Le retour du professeur de danse', Henning Mankell, Seuil, Points

08 mai 2007


Policier de comptoir (de prêt) - 3 : En balade

Evidemment, tu ne pouvais pas savoir. Qu’en plus d’être bibliothécaire, j’aimais bien, par certains dimanches matins, baguenauder sur l’une ou l’autre brocante. Peut-être préfèrerais-tu que je dise ‘marché aux puces’ pour être sûr d’être compris par nos lecteurs français ? Va donc pour ‘marché au puces’.
Assise derrière tes bibelots, tu as dû me reconnaître, bien que tu aies prétendu le contraire quelques instants plus tard. Dans ton bric-à-brac, c’est ta caisse de bouquins qui a attiré mon regard. C’est toujours comme ça dans ce genre d’endroit, les livres sont à peu près les seules choses que je regarde. Bien m’en prit cette fois encore. Il faut dire qu’il n’y en avait pas beaucoup, une vingtaine tout au plus. Je n’ai donc pas eu de mal à reconnaître les ‘miens’ : le plastifiage, les étiquettes et les cachets m’y auraient aidé si besoin en était.
Ainsi donc, ça m’arrivait à moi : je retrouvais en vente des livres qui appartenaient à l’institution que je servais avec dévouement (si, si !). Ce genre d’évènement qui, je le croyais, n’arrivait qu’aux autres.
Je l’avoue, je l’ai jouée assez basique et, après coup, j’ai regretté de ne pas l’avoir pris avec plus d’humour :
- ‘Mais ! Ils viennent de ma bibliothèque ces livres-là !’
- ‘Ah? Je ne sais pas’
- ‘Vous ne me reconnaissez pas ?’
- ‘Non’ (menteuse, menteuse, tu brûleras en enfer !)
- ‘Mmmm….vous habitiez à (tûûût) avant ?’
- ‘Oui’
- ‘Et vous êtes madame (tûûût) ?’
- ‘Ah non !’
- ‘C’est juste, c’est le nom de votre fille n’est-ce pas ?’
- ‘Oui…’
- ‘Bon, je vais donc les emporter sans vous les payer’

Ni toi ni ta fille n’avez moufté. Le justicier des bibliothèques publiques de campagne avait encore frappé. Le fourbe ennemi acceptait la sentence. L’un et l’autre espéraient bien ne plus jamais se revoir.